mardi 26 novembre 2013

Rando des potos de Lacaroumieux, le retour

Tout ce petit monde se retrouvait finalement sain et sauf bien que légèrement humidifié dans les moindres recoins de leur triste anatomie rabougrie par le froid, en particulier popaul qu'était rentré au fond de sa coquille tel le bigorneau moyen !

Le Marco, statue de boue vivante, décida qu'il ne fallait pas s'éterniser pour, et d'une, que ses comparses de la bourritude n'attrapent une sainte crève, et de deux, qu'ils ne lui tombent sur le paletot Abraracourcix après ces émotions vives comme l'eau qu'ils venaient de fendre à grand peine.
La pluie continuait à darder ses millions de hallebardes en rangs plus que serrés et la lumière commençait à baisser dangereusement, ce qui ne manquait pas de préoccuper notre gascon qui connaissait les embûches des restes faisandés de cette balade qui prenait des allures de raid sibérien, les loups en moins ... quoi que ...

La XLS longea prudemment le bord du torrent à la recherche d'un chemin, un sentier, une draille, n'importe quoi m*rde ! Mais fallait sortir de ce satané bois de vergnes qui te giflaient à la volée lors de ton piteux passage.
Les mecs, le luc levé comme des trialistes suivaient l'aut' taré en file indienne, concentrés à l'extrême pour ne pas se vautrer lamentablement dans l'onde bouillonnante ou contre un bouquet d'arbres des marais.
Mais ils avaient encore la force de maudire cette idée saugrenue de répondre à l'appel de la forêt gasconne par le truchement d'un de ses habitants, le plus barré qu'elle ait pu enfanter dans son délire mystique !

Bon, ils n'avaient pas le choix et encore moins les clés du camion alors ils faisaient confiance au chauffeur pour les "mener à bon port", comme le rouméguait le Sergio dans sa barbe de druide.
Un sentier tortueux s'offrit bientôt aux tétines ruisselantes des boudins de nos brêles. C'était déjà ça ! Cela donnait l'impression factice de se rapprocher d'un semblant de civilisation.
Du coup, c'est d'un coeur plus léger à défaut d'être vaillant que les timonistes kamikases avançaient dans un décor pourtant lugubre sur lequel planait l'ombre inquiétante du crépuscule.
On était entre clébart et lupus canis, ça commençait à sérieusement puer du luc, c't'histoire.

Surtout que, comble du désespoir, le sentier s'enfonçait dans des marécages peuplés d'ajoncs qui te cachaient le paysage et te faisaient croire que t'étais au beau milieu d'un immense labyrinthe végétal.
Les plus anciens de cette bande de foies jaunes avaient des images de comics américains bien moyenâgeux peuplés de monstres sans les super-héros pour leur sauver la peau !
Y avait juste une sorte de gascon qui, concentré dans ses prières de mécréant pour retrouver sa piste, ne leur montrait qu'un postérieur inquiet.
Soudain, au détour d'une touffe d'ajoncs plus fournie que les poils de Linda de Souza, la terre ferme, si l'on peut dire en pareilles circonstances météorologiques, présenta son dos accueillant à des motards soulagés.

Il était temps car on n'y voyait pas mieux que ceux qui y voyaient moins bien ... je vous laisse réfléchir à ça, comme ça vous soufflerez pendant ce temps ...
PFFOOOUUU ! On va pouvoir remettre enfin du gaz ! Hé mais t'es ouf ou bien ? Ben a priori ouais.
Le Marco, sans doute bouffé par l'adrénaline accumulée depuis la traversée du torrent, piqué par on ne sait quel taon virtuel, vissa la poignée pour envoyer du bois, plein pot les gamelles !

Le fourbe avait trouvé un systus bien astucieux pour doper son éclairage car la pâle lueur de l'ampoule six volts d'origine laissait visiblement place à une sorte de ... de quoi ? On dirait un ... mais oui ! Un phare à iode !
Ventre Saint Gris ! Il éclaire la piste comme une bagnole cet empêtardé mondain ! L'avait tout prévu pour nous humilier le fourbe. Ne vous fiez jamais à un gascon " menteur, voleur et trousseur de jupons "
Heureusement qu'on n'a pas emmené nos Géraldines et leurs cousines.
Bon, on prend note ... et on colle à sa roue comme un troupeau de sangsues mâles en rut. Et ça marche ! ça va même drôlement vite dans l'ombre naissante d'une nuit froide comme un tombeau.
En parlant de tombeau, les brêlistes l'ont ouvert au moment où je vous parle. Plus personne n'a froid Sacrebleu ! On balance la purée pire qu'à la cantoche.
Le super n'est pas cher par ici pasque, pardon, mais on le crame au litre et sans remords.

ça commence à puer l'huile frite pire que dans un gastos chinois aux heures de pointe. Les bouilleurs sont mis à rude épreuve par les as du caoutchouc tordu, que dis-je : fusionné au guidon !
çui qui commence à en faire, de l'huile, c'est nôt' bon Pit qui commence à regretter vaguement d'avoir embarqué sa ch'tite Kawa dans cette galère immonde.
Son moustique va-t-il tenir jusqu'au bout avec la danse du ventre qu'il lui mène depuis maintenant des heures ?!
Pourvu que le filtre à air n'ait pas avalé de l'eau, parce-qu'avec son cylindratrou c'est le serrage assuré ...

jeudi 7 novembre 2013

La rando des potos de Lacaroumieux ...

Marco était accoudé au zinc de Fat Bob, le cafetier de Lacaroumieux et il regardait à travers les vitres les trombes d'eau qui s'abattaient avec violence, arrosant la place ronde du village sans discontinuer.
Plus le temps passait, plus son inquiétude s'épaississait, comme les volutes de fumée qui enveloppait les joueurs de belote, tout près de lui.

Comment diantre des motards, aussi courageux soient-ils, allaient-ils braver ces intempéries pour traverser la France entière juste pour la promesse d'un bon coup de moto dans la riante campagne lacaroumoisine ?
Riante ? Tu rigoles, là ?! Noyée sous un déluge que Noé n'aurait pas renié, oui !
Notre Marco s'envoyait nerveusement café sur café en scrutant les minutes qui s'égrainaient lentement sur la pendule HD du comptoir.

Il faut dire que le bistrot de Bob tenait plus du saloon qu'autre chose. Ce dernier était un fan absolu du folklore US dans un mélange détonnant d'Harley Davidson, de country music, de Rock§Roll et d'un tas d'autres symboles américains voire sud-am car les sombreros mexicains côtoyaient les stetsons ricains accrochés aux poutres monumentales.
Le résultat stupéfiant de ce melting pot de cultures bouillonnant dans la marmite en fonte à la forte tradition gersoise donnait une ambiance surréaliste à ce troquet de village perdu au beau milieu de nulle part.

Mais c'était surtout le quartier général del Marco, attaché à ses traditions comme la tique au dos de son chien, malgré la fumée des goldos qui lui piquait la gorge et les yeux !
Remarque, là, il la sentait pas c'te fumasse. Trop occupé à scruter la place vide, si désespérément vide.
Le brouhaha des joueurs se disputant pour une plie mal accomplie ne parvenait mêm' pas à le détourner de cet espace désert fouetté par un épais rideau de flotte crépitant sur les pavés inondés.
Là, c'était foutu. Son beau rêve était en train de faire naufrage dehors avec cette maudite pluie diluvienne et cet orage ...

A peine avait-il pensé à ce dernier élément funeste qu'un éclair illumina la place d'une lueur blafarde. Instinctivement, les clients du café courbèrent l'échine en attendant le coup de tonnerre qui ne tarda pas.
BRRRAAAAOOOOOOOUM !!!!!! 
Les vitres tremblèrent au point de donner l'impression qu'elles allaient se briser et les poitrines, même les plus robustes, subirent l'onde de choc malgré le fait qu'elles se soient préparées.
Un vent d'une violence incroyable prit d'assaut la porte d'entrée monumentale jusqu'à la faire craquer. Elle s'ouvrit brutalement sur un spectacle apocalyptique !

Les buveurs de pastis crurent halluciner devant un tel cauchemar. Une tribu de zombies plus vrais que nature s'engouffra dans la brèche béante de l'entrée, comme échappés d'un film d'horreur ...
Le robuste Fat Bob, qui en avait vu d'autres en Indochine car c'était un ancien légionnaire, prit quand même ses précautions en saisissant avec sa délicatesse coutumière une batte de base-ball en bois d'arbre apte à faire éclater la cheutron d'un envoyé du Démon comme un fruit trop mûr.

Il allait commettre l'irréparable devant une assemblée consentante lorsque sa cible s'exclama dans une diatribe ô combien humaine :
" Hé bé p*tain ! L'est bien pourri vôt' pays de bouseux !!!"
Le zombie qui ressemblait plutôt à un marin pêcheur naufragé avec sa tenue que ne renierait pas un chalutier brestois, ôta son immense capuche dont l'eau bénie dégoulina aussitôt sur le carrelage crasseux de Bob.
C'était le Sergio ! Blanc comme un linge, il semblait pourtant rouge de colère.

Le Marco ne savait plus s'il devait être soulagé ou s'inquiéter de la réaction négative du breton à son invitation finalement incongrue au vu des éléments déchaînés.
Devant sa tronche interloquée qui lui donnait un air comique, nôt' Sergio ne put s'empêcher d'éclater d'un rire de stantor :
"Mouahahaha ! Tu croyais quand même pas qu'on allait se défiler mon biloute ?! On est bien là et t'as plutôt intérêt que ta foutue balade soit réussie ... parce-que sinon, c'est direct les plumes, le goudron fumant et l'étoupe dans le fion !!!"

Le Sergio prit alors son Marco dans des bras de déménageur et l'étreignit fraternellement à l'en étouffer. Celui-ci, à court de souffle, aperçut comme dans un rêve au dessus de l'épaule du robuste celte les silhouettes familières de Padin et d'Eldo, trempés comme des soupes mais visiblement satisfaits d'être arrivés à bon port et sans encombre siouplait. 
Après les chambrages qui remplaçaient les salutations usuelles, trop propices à laisser filtrer une émotion coupable, ils s'effacèrent devant le reste de la troupe, tout aussi humide qu'ils étaient mouillés.

Il y avait là le grand Nico, suivi d'Olive le provençal et de Rick le picard. Derrière eux se pressaient Riton le sudiste et son compère Fred le toulousain.
Punaise ! Ils sont venus, ils sont tous là ! Incroyable ! Depuis le temps qu'on essayait en vain de se rassembler, c'est au milieu d'une atmosphère de fin du monde que le rêve devenait enfin réalité.
Nos acolytes ruisselants restaient là, les bras ballants, comme si le but de leur rencontre était accompli et que, du coup, ils ne savaient plus quoi faire.
Il faut quand même avouer que la plupart d'entre eux avaient traversé la France, comme Rick le picard dont les yeux passablement cernés trahissaient un état de fatigue avancé !

Un second éclair illumina de nouveau l'intérieur du café mais le coup de tonnerre quoi que puissant, n'eut pas la même violence que le précédent.
La pluie tombait encore dru mais pas avec la même intensité. Apparemment le pire était passé.
Entre Fat Bob fringué de cuir noir de la tête aux pieds, chaussés des inévitables Santiags et les motards accoutrés à l'ancienne, Marco songea qu'il était entré dans un western spaghetti de Sergio Leone et qu'il n'en ressortirait que les pieds devant.

L'air d'harmonica si lancinant du mythique "Il était une fois dans l'ouest" lui vrilla le cerveau lorsque ses potes embrayèrent comme un seul homme faisant sonner les fers de leurs bottes de cross jusqu'au zinc où ils s'accoudèrent nonchalamment. 
Instinctivement Fat Bob, qui était un pro, avait déjà contourné le comptoir et il attendait les commandes de scotch bien sec que les cowboys n'allaient pas manquer de le sommer de leur verser.
Au lieu de cela, ce fut Eldo qui brisa le lourd silence qui s'était installé par un : " Un café serré pour tout le monde, s'il vous plait monsieur" qui tira un rictus de pitié à l'ancien baroudeur devenu barman.

Direct le percolateur qui se mit à fumer pire qu'une loco du Pacific express et à embaumer l'air vicié du saloon, couvrant même les odeurs entêtantes de tabac dans un brouillard de fumée à découper à la hache.
Soudain, une apparition lumineuse embrasa nos lascars ! Les battants des portes western du fond s'ouvrirent sur une créature de rêve que tous les matous dévorèrent aussitôt des yeux.
Une blonde incendiaire qui semblait venue tout droit du Texas avec son Stetson noir, son gilet en cuir à franges ouvert sur une chemise à carreaux largement échancrée, le tout au dessus d'un mini short en jeans laissant descendre de sublimes jambes fuselées s'enfonçant dans des bottes mexicaines en peau d'Alligator.

Nos invités comprirent immédiatement pourquoi le café de Bob était si fréquenté malgré les éléments déchaînés dehors qui auraient découragé plus d'un honnête homme.
La voix chaude et virile de Fat Bob s'éleva dans un silence de cathédrale : "On regarde mais on ne touche pas, messieurs. Propriété privée !" Le message avait le mérite d'être fort et clair.
" Natacha, viens servir ces messieurs. Ils n'ont pas de Harley, mais c'est quand même des motards qui viennent de loin."
La belle s'approcha de son homme et lui roula une galoche de compétiton qui laissa nos spectateurs tout chose puis elle se tourna vers le perco pour une démo de service express tout bonnement hallucinante.

Pour reprendre leurs esprits mis à mal par une telle vision, les motards décidèrent d'aller boire leur jus au fond de la salle enfumée, histoire de "décompresser".
Marco leur apprit que Fat Bob était marié avec Natacha, une ukrainienne qu'il avait arrachée des griffes d'un redoutable proxo dont on n'avait d'ailleurs plus de nouvelles depuis.
Soudain, Nico, piqué par je ne sais quelle mouche, un taon peut-être, poussa un cri d'émerveillement. Devant ses yeux ébahis trônait un magnifique piano à queue, estampillé Stainway et totalement incongru dans ce décor. Mais comment diable une telle merveille pouvait-elle avoir atterri dans ce bouge minable ?

Le plus extraordinaire dans l'histoire, c'était que ce piano luisait comme un sou neuf et qu'il semblait prêt pour un récital ! Notre Nico s'approcha en tremblant de tous ses membres de l'extraordinaire instrument, se demandant s'il n'allait pas se réveiller à tout moment.
C'est alors que Natacha l'interpella du fond du café : " Vous aimer le piano ?" Aimer le piano ? Tu parles ! Il se serait damné pour s'assoir un jour devant un tel bijou. 
La réponse ne fut évidemment pas à la hauteur des sentiments violents qui habitaient le pôv' Nico : "Euuuh ... oui ... un peu. "
"Toi peux jouer, si vous voulez ..." 

GURGH ! Là, el Nico, il devint liquide sur le coup ! Put*in de Zeus, jouer de la musique sur un Stainway !!! Après, il pouvait mourir, il s'en foutait comme d'une guigne.
Mais bon, le bignou, il devait être horriblement désaccordé et la suite pouvait devenir affreusement décevante.
Tant pis ! On n'allait pas prendre le risque de déplaire à une aussi belle dame au mari si ... impressionnant !

Le Nico régla donc le tabouret, un vrai, de concert et s'installa face au clavier d'ivoire puis il ferma les yeux et donna l'impression à ses potes de s'endormir subitement.
Lorsqu'il les rouvrit, il semblait tout à coup habité. Les premières notes s'envolèrent dans l'atmosphère religieuse du bar et elles tirèrent aussitôt des larmes de bonheur au pianiste en extase. Le son était d'une justesse extraordinaire et la machine accordée à la perfection !
Il put ainsi exécuter tout le répertoire de cette musique noire qu'il adorait : le divin ragtime ! Ses doigts s'envolaient comme des papillons, effleurant avec légèreté les touches d'ivoire et tirant des sons confiant au sublime.

Les buveurs de pastis à la carte d'ordinaire agressive s'étaient eux-même arrêtés de jouer, subjugués par les envolées lyriques qui les poignardaient d'un bonheur jusqu'alors inconnu.
Les cafés refroidirent dans leur tasse, les ricard se réchauffèrent et les glaçons fondirent lentement mais qu'importe ! Un instant de pure magie venait de naître entre un amoureux des arpèges et un piano du ciel ...

La belle Natacha vint rompre ce moment de pur bonheur avec un sourire charmeur à faire fondre un Inuit, ou un esquimau, allez savoir et elle prononça cette phrase tant connue mais si nouvelle avec son accent slave :
" Ces messieurs mangeront bien quelque chose ?"

Tu parles Charles ! Maintenant que Zeus avait fini de nous balancer ses rayons mêm' pas cosmiques sur le coin du mourre et que Nico essayait vainement de revenir sur terre, on entendait des rafales borborygmiques qui, pour barbarismes qu'elles soient, n'en remplissaient pas moins la salle de leurs grouillements intempestifs !
C'était le festival de canalisations, c't'histoire.

Faut dire que les gonziers, ils s'étaient pelé quelques centaines de bornes taquet, la trouille au bidon Halliday de croiser nos amis les schtroumpfs bleus et que la concentration extrême mobilisée pour cet exercice périlleux avait salement pompé dans leurs réserves lipidiques. Bref, ils avaient une sainte dalle alors qu'ils dévoraient la belle ukrainienne des yeux : mais ça ne nourrit pas son homme, ça !
C'est encore une fois Eldo le chef de meute qui répondit avec son franc parler coutumier issu d'une longue tradition françouaise :
" Qu'avez-vous à nous proposer chère enfant venue de l'Est ?"

Et c'est la que la carrure immense de Fat Bob emplit l'espace de sa masse volumique hors norme. Les motards courbèrent instinctivement l'échine en attendant la sanction divine, mais cette dernière ne vint pas, contre toute attente.
Au lieu de ça, l'hénaurme leur répondit de sa voix mélodieuse rappelant le grizzly en rut :
"Vous avez la formule ptit dèj texan, messeigneurs".

La réponse rendit le troupeau perplexe : texan, texas, ça on pouvait l'entendre, mais le contenu c'était une autre paire de ... manches.
Une fois de plus Saint Eldo, qui ne reculait devant aucun sacrifice, demanda d'une voix mal assurée par la MAF :
"De quoi est composé, cher cafetier aux belles bacchantes, ce repas roboratif ?"

Bob le toisa avec un dédain qu'il voulait suprême mais qui n'eut pas l'effet escompté car Eldo et ses acolytes faillirent s'étouffer à force de contenir un fou-rire coincé au fond de leur gargamelle en sursis.
Ne voulant pas perdre la face devant sa douce moitié car il aurait dû éliminer tous ces importuns sur-le-champ, notre montagne de muscles enrobée d'un soupçon de gras-double se contenta de répondre sur un ton tellement détaché qu'il s'enfuit aussitôt :
" Offf, juste quelques agaceries : bacon and eggs, marmelade, toasts, steak and chips ... "

Les mecs, ils avaient tellement faim qu'ils auraient bouffé la table, alors va pour le repas texan. On va lui faire la fête à son ptit dèj à l'autre poilu !
Aussitôt dit, aussitôt fait : Bob et Natacha disparurent dans la cuisine et rapidement l'air s'emplit d'odeurs de grillades assez surprenantes pour un repas du matin.
Les motards, pour tromper leur faim, entreprirent de se donner des news sur leur vie, leur oeuvre et se mirent naturellement à cause brêlons, ce qui constituait, il faut bien l'avouer les 99% de leur journée, les 1% restants se partageant la famille et le boulot.
Sauf peut-être pour Mâme Eldo, mamy gadin et mamie tartine qui selon la légende manianet le rouleau à pâtisseries avec une dextérité redoutable et redoutée par leurs chers maris, bien briefés sur le coup !

Un "AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH !!!" collectif, pour ne pas dire général, se répandit soudain dans la pièce enfumée par le parfum suave de nombreuses sèches sacrifiées sur l'autel des vanités des piliers de bar.
C'étaient les brêlondistes qui voyaient s'approcher le couple sudiste poussant une desserte en bois d'arbre massif, vous direz du chêne pour ne pas passer pour des glands (sic).
Dessus, on aurait dit que la célèbre corne d'abondance avait répandu la bonne parole sur la terre et accessoirement rempli les assiettes d'énormes morceaux de barbaque rouge grillée à point.
Tout autour, dans une assiette qui ressemblait plus à un plateau, un mur de frites qu'on aurait pris pour des betteraves rouges, entourait la viande comme pour la contenir ...

Put..naise ! Rien qu'une assiette, y avait de quoi faire vivre une famille pour la journée. Qu'importe ! On n'a pas traversé notre cher hexagone pour caler devant un ours canadien et une poupée russe, nom de Zeus !
Les motards saisirent leur fourche, pardon, leur fourchette à dix dents aiguisées comme des harpons, leur coupe-chou des familles, indûment nommés "couteau à steak" et ils entamèrent avec enthousiasme leur premier travail d'Hercule.
Gloups ! Une part texane de beef devait peser son kilo de chair et de sang. Et comme le couple diabolique s'était assis, Natacha sur les genoux de son ogre, nos brêlonistes ne voulurent pas perdre la face.
Insoutenable légèreté de l'être ! La guerre à la viande de ... de quoi au fait ? ... était déclarée !

ça taillait, ça découpait, ça déchirait à qui mieux mieux; ça sciait, ça raclait, ça renâclait, ça renaudait mais ça engloutissait velu.
Les regards étonnés que ne pouvait contenir qu'à grand peine le couple sécessionniste constituait la récompense suprême pour des brêleux nauséeux !

Vision surréaliste dans le saloon de Robert : des humains réduits à leur part animale, semblable à une horde de loups affamés au cours d'une curée autour d'un élan !
Les bruits sourds de mastication le disputaient à des claquements de mâchoires dignes d'un congrès de hyènes sur la carcasse d'un dromadaire séché au soleil du sahara.
Perspective peu ragoûtante mais juste d'un tableau de chasse qu'une meute de Saint Huberts n'aurait pas renié, foi de corniaud !

Mais toutes les bonnes choses ont une fin ici-bas et il ne resta bientôt dans les assiettes plus qu'un volcan de patates et son lac de jus de viande ...
Les compères, repus, se calèrent tant bien que mal sur leur chaise qui menaçait de rompre sous la charge nouvelle, lorsqu'ils sursautèrent devant une révélation ... comment dire ... étonnante ?
" Alors, il est bon mon bison ?"
Ils comprirent instantanément que le repas texan, c'était pas du flan !

Bon, les mecs y z'avaient le kangourou qui baignait depuis trop longtemps dans un slip aux senteurs douteuses, sans doute dues aux flatulences acides résultant d'une digestion laborieuse.
Y leur fallait de l'air pur sur le coup, alors ils sortirent comme un seul homme sous la pluie rafraîchissante qui dardait la place déserte de mille coups d'aiguilles glacées.

Je ne donnerai pas les noms car ils se reconnaîtront sûrement mais certains bilouts durent faire in petto vidange graissage dans un petit coin sombre pour refaire de la place dans un système digestif malmené par la tambouille du Fat guy dont on apercevait la tronche hilare à travers les vitres embuées de son gastos.
Après la douce mélodie du Nico, on eut droit malheureusement à un festival de vents aux fragrances peu ragoûtantes pour des narines délicates !

Enfin, les fondements se turent après quelques gargouillis résiduels. Ces hommes rudes avaient vaincu la Bête, enfin, j'veux dire le bison.
On pouvait passer à autre chose de plus fondamental. Facile à dire une fois le ventre plein, s'pas ?!
Et là, les larmes montèrent direct aux yeux del Marco devant la vision enchanteresse d'un tas de véhicules garés en vrac, dans un désordre indescriptible mais paradoxalement avec classe, ce qui n'est pas, vous en conviendrez (z'avez intérêt), le moindre des paradoxes de cette histoire.

Prenons le menu par le début :
Padin ? La classe j'vous dis ! Une DS Citroën cabriolet d'un blanc immaculé, sauf les bas de caisse tous crottés par les derniers kilomètres en rase campagne, accouplée à une remorque en galva qu'on aurait crue échappée d'une pub Trigano avec dedans une Honda SL candy green d'une beauté à ... surtout pas l'emmener dans une galère pareille :! Quel taon du Rouergue l'a piqué nôt' Padin ? Il connaît le Marco ou bien ?
Visiblement pas pour exposer sa brêle de concours d'élégance aux redoutables pistes gersoises des environs immédiats de Lacaroumieux.
A voir sa cheutron blafarde sous les réverbères à la lumière qui ne l'était pas moins, on compris qu'il en prenait soudain conscience !

Eldo ? C'était quoi ce Saviem six wheels drive transformé en camping car ? Il voulait dormir au milieu des marécages ou quoi ? En plus sa SL brillait comme une émeraude polie à Amsterdam, juchée sur une plateforme style monte-charge à commande oléopneumatique que n'aurait pas reniée Jean Pierre Fournalès !

Sergio ? Une 203 break Peugeot couleur sable attelée à une remorque maison à quatre rails, faut c'qu'y faut, et double essieu avec des amortos à lames commack et des roues de camion Berliet aux crampons affûtés.
Et dessus, une SL gold ! Mais on est tombé sur un nid de SL, là ?!

Et le quatrième mousquetaire à la SL "candy esmeralda", qui cela pouvait-il bien être Mmmmh ?! Le pianiste virtuose de 'ta l'heur', l'amoureux transi du Ragtime, les doigts de papillon, j'ai nommé Nico l'esthète de la touche d'y voir, si tu l'oses ...
Son break 504 d'un blanc "émail diamant" devançait une remorque fermée de la même couleur, une ancienne bétaillère reconvertie avec bonheur en boîte à poneys Honda ...

Et le Marco alors ? C'est vrai ça ! Qu'est-ce qu'il avait comme brêle ?

L'érection résiduelle de ses hôtes (de ces bois) consécutive à la vision fugace d'une Natacha penchée à la fenêtre du premier, se résorba à la vitesse exponentielle du reflux sanguin de leurs corps caverneux.
La cause ? Ils étaient en présence d'une machine de guerre, une silhouette qui cachait à grand peine sa préparation factory bike avec un pacson de pièces espéciales, taillées dans la masse quand ce n'était pas dans le roc !

Les plus perspicaces, c'est-à-dire tous, reconnurent sans peine des amortos Fournalès dernière génération, une fourche revisitée avec des prolongateurs à air comprimé, une roue avant pas d'origine avec un moyeu tambour double cames aux basculateurs sans équivoque, une ligne d'échappement ayant un très lointain rapport avec l'enclume en tôle d'origine, un carbu gros comme une marmite, non, comme un toupin, un filtre à air K§N, un réservoir jumbo en fibre de plastique véritable, une selle en peau de zèb anti glissade, des jantes alu anodisées or 24 carats, des soufflets de fourche gros comme l'accordéon d'Aimable en mal de pub et des pneus aux tétons d'une agressivité taille X.

Les esthètes de la mécanique des fluides (eau, essence, huile, colza, Vichy, ...) n'eurent qu'à se pencher un peu sur le bouilleur pour se rendre compte que la cylindrée de 125 cc n'était plus qu'un lointain souvenir pour cette bestiole. Le cylindre non marqué au dessus de l'embase et la taille du collecteur d'échappement de type 185 XLS faisaient plus que foi ...

Tout à coup, un raffut d'enfer déboula de la rue des martyrs de la cause perdue, s'amplifia jusqu'à vriller les tympans en peau de saucisson de nos timonistes qui en avaient pourtant vu d'autres.
Quoi t'est-ce que ce bord*l, nom de Zeus ?!

Une espèce de Half-Track monstrueux dont le silencieux d'échappement n'était qu'un lointain souvenir de ses années d'insouciance déboucha sur la place en crachant des volutes de mazout dans l'air frais du village plus bucolique du tout !
A son bord, un Anglais tout ce qu'il y a de plus britannique avec sa casquette en tweed vissée sur la tête arborait le large sourire de celui qui savait son entrée réussie !

Tonnerre de Brest, aurait pu s'exclamer Sergio si sa mâchoire inférieure n'avait pas pendu dans une attitude de stupeur qui le faisait ressembler à un mérou, mais c'était ce bon vieux Pit !
Sur le plateau débâché trônait une XL flambant neuf et à ses côtés une Kawa KS vert métal toute mimi. On savait que notre Pit était un esthète ... mais à ce point !

Alors bande de feignasses ! C'est comme ça qu'on fait chauffer les moteurs ?!

Allez, allez ! Descendez-moi ces brêles vit' fait de là et faisez vrombir les moulins ... et plus vite que ça qu'on n'est pas d'ici !!!

Quelle mouche a piqué nôt' Marco pour s'exciter comme une puce sur le dos de son chien préféré ? Là, d'un coup, on a senti le coup fourré aux noisettes.
Si l'est autant pressé c'est qu'il doit y avoir une raison bien pourrie, connaissant le lascar 
ça sent pas bon c't'histoire, j'vous l'dis moè !

Les timonistes descendirent donc leurs brêlons dans un silence pesant comme un âne mort. Et c'est presque religieusement qu'ils déplièrent le kick de leurs belles pour les faire craquer dans un ensemble que l'orchestre filarmonique de Berlin dirigé par Herbert Von Karajan n'aurait certainement pas renié.
ça se mit à poumpoumer velu sur la place centrale devant le café du même nom !

Du SL grave malgré ses ridicules 122 cc, du XL au son quasi identique à son aînée, au pot près, du XLS hystérique ... mais qu'est-ce qu'ils ont ces XLSistes à vouloir toujours dégorger le poireau comme un deux temps ? Les relents de la guerre de religion avec l'ennemi honni, Sainte DTmerdix, autant jalousée que secrètement admirée ?
Toujours est-il qu'entre Olive, Riton et Rick dit "le Gord' " on eut droit à un festival de GROOOOIN ! GRRRROOOOOINN !!! pas piqué des hannetons ... jusqu'à ce que le Marco fasse ébrouer son bouilleur.

Et là mes aieux, y avait de quoi réveiller tous les ancêtres de Lacaroumieux ! Le son d'un little Gromono qui respire comme un athlète type Ben Johnson en finale du cent mètres.
Euh ... les timonistes eurent un frisson qui leur parcouru l'échine de haut en bas pour se perdre dans un tremblement jusqu'au fin fond de la raie fessière car ils commençaient à se demander comment ils allaient pouvoir suivre le missile intergalactique drivé par Albator himself !
Surtout que l'enfoir... leur hôte du jour avait monté des chaussettes Bibendum aux crampons acérés comme des clous de charpentier. Devait tenir le parquet c't'XLS revisitée.
Les BRRROOOAM ! BROOOOOAAAAM !!! que balançait l'air de rien un silencieux qui n'en avait audiblement que le nom, préfiguraient des volées de cailloux pour ses futurs poursuivants à chaque passage de rapport consenti.

Bref, ça commençait à sentir la poudre, la vraie, la noire bien grasse et bien sèche, sur la place centrale de Lacaroumieux ...

Les moulbifs étaient maintenant à point et ronronnaient au ralenti comme des tigres satisfaits pendant la digestion de quelque missionnaire égaré, mais pas pour tout le monde.

ça roucoulait tendrement dans une pistonnade party qui invitait à la méditation sur ce monde fait d'harmonie QUAND SOUDAIN !
Mais c'est quoi ces GRÊÊÊT ! GRÊÊÊÊTTT !! infâmes ? Une attaque en piquet de quelque DT suicidaire tel le Stuka en 1945 ?

Que nenni mes bons et loyaux amis (pour le moment parce-que lorsqu'on va lâcher les fauves, ça sera chacun pour soi et Dieu pour moi) : c'était tout bonnement la KS qui tentait de s'éclaircir une voix éraillée par l'humidité ambiante. Quelle idée saugrenue de démarrer un cylindre plein de trous qui puent dans cette atmosphère de Déluge !
Mais son proprio, qui avait lorgné du côté de la XLS overtapée du Marco, trouvait soudainement plus prudent de descendre son arme fatale qui miaulait maintenant comme un chat hystérique en période de rut car elle était équipée de peuneus ritaliens complètement off road qui lui allaient à ravir.

Bon, mais dites-moi ? ça se précise c'te baston, euh cette rando bucolique (ch'ais pas ce que t'as bu mais tu vas l'avoir la colique mon lascar !)
Et les autres gaziers avec leurs brêles stock, ils faisaient pas un peu la gueule, hein franchement ? Se fader la moitié, pour ne pas dire les trois-quarts de l'hexagone pour venir se faire pourrir,enrhumer, repeindre, satelliser, oublier ... c'était quand même pas réjouissant comme perspective ?
Ben, mêm' pas, y z'avaient tous la banane que ç'en était louche des deux yeux ...

Du coup,y en a un qu'il est parti, c'est l'Sergio au guidon de sa SL "gold" : pour un ancien compagnon, posséder une brêle en or est un signe d'excellence , vous en conviendrez !

Surtout que le voyou en a profité pour voler la pôle à la KS de Pit, le groin dans l'échappement très libre de la XLS marcolienne !
Le susnommé n'a pas tardé d'ailleurs à envoyer la sauce dans la purée au jus de piston en fusion. ça te rabote les bas-côtés destabilisés par tant de fougue là !

Et le Sergio qui s'accroche comme une tique ivre de sang frais alors que Pit commence à danser un tango chaloupé contrôlé à la poignée de gaz et à l'anglaise.
Riton qu'était resté plutôt discret jusque-là s'immisça illico dans le trio de tête, profitant des 175 cc de son kit Kivabien, très recherché par les maniaques du caoutchouc torsadé (côté poignée droite : source :" Le Timono pour les nuls").
Mais derrière ça jouait déjà des coudes sans échauffement : Padin, sans solidarité aucune pour ses compagnons de la cause SL, leur avait déjà fait un block-pass que n'aurait pas renié Haakan Calqvist, les plantant là, tout chose.
Olive n'en demandait pas tant pour s'engouffrer dans la brêche spatio temporelle créée de main de maître par ce coquin de Padin. Dans son aspi, il entraîna l'Fred peinard calé dans sa roue, qui donnait la furieuse impression de randonner LUI !

Je sens que vous allez me poser la question, chers lecteurs assidus en manque de saines lectures à l'huile bouillante : et le Rick alors, il sent le mazout ?

Ben non. Notre Picard croyait au départ qu'il allait randonner peinard et il avait de ce fait adopté la position pépère du timoniste en goguette. En goguette ? Il réalisa tout à coup !
Goguette et timono ne peuvent se marier : un timono tu lui tires dans la gueule pour lui faire cracher tous ses poneys quand t'es de surcroît en bande désorganisée !

Et là, il se souvint de son surnom acquis de haute lutte sur ses terres picardes : Jérémy Lapurée qu'un illustre dessinateur de BD lui emprunta quelques décennies plus tard.
Alors il souda comme un démon et revint dans le match comme une balle boxée par Marcel Cerdan (je sais : l'image est osée)

... du coup le Picard volant remonta comme un boulet de canon sur les SL vertes de peur des Nico/Eldo Bros et commença à chercher la moindre petite faille dans leur pilotage de gentlemen qui réglaient leur différend à grand coups de tatanes bien sentis !

Devant, Olive tirait Fred qui se laissait faire sans vergogne, d'autant que sa XL était un modèle de réglage carb' avec une souplesse moteur d'un autre monde lui permettant de ne pas patiner comme ... Pit par exemple, qui tenait tellement la route qu'il lui fallait tout le travers du chemin gadouilleux pour rester dedans. Mais pour l'instant, il maîtrisait plutôt bien l'exercice le bougre !

De son côté, Padin, bien placé, sentait le coup fourré de la part d'un Riton chaud bouillant, prêt à tout pour bouffer du Sergio, lequel pestait comme un charretier contre le Pit dansant qu'il ne parvenait à passer ni à droite ni à gauche screugneugneu de screugneugneu !!!

Et cet enfoir... le guide Marco qui enroulait du câble comme un missile pour montrer à ses hôtes du jour qu'il savait manier la poignée de gaz comme personne ! Quelle truffe ! C'était une rando ou une boucherie ?
Avec des timonistes du calibre de nos lascars, ça pouvait pas être une rando classique en charentaises car ...
chacun avait bien caché son jeu !

Bon, on a vu que Pit avait son arme fatale avec un cylindratrouquipuelasynthèse comme seul Kawa savait en sortir à l'époque bénie des H2, H1 et autres S3 (les KH étant bien entendu pour les tarl*uzes).
Le Fred avait trouvé un bon compromis "à la Freddo" et une adhérure de trial lors des Scotish six days car les conditions du moment étaient effectivement britanniques.
On ne parle pas de cet empêtardé de Marco qui jubilait comme un traître dans un film de capes et d'épée d'André Hunnebelle (XLS) : la prépa de maître Lloret lui aurait permis de bien se classer dans l'enduro extrême de Brie Comte Robert si ce bled nordiste n'avait pas été aussi loin de ses bases gasconnes.

Mais détaillons un poil les innocentes brêles des autres protagonistes :
et là, j'annonce conspiration de SL, ni plus, ni moins. Une réunion secrète digne du grand ordre des chevaliers du piston hypertrophié entre un breton combattant, un rouergat sans scrupules, un viennois à la chantilly et un alpin de haute volée, avait débouché sur une préparation commune d'une telle précision sur le plan de l'équilibre moteur / partie-cycle qu'ils semblaient avoir trouvé un nouveau concept TT.
Une espèce de mélange entre du trial, de l'enduro et un je ne sais quoi qui faisait la différence. Résultat des courses : une adhérence de folie, une prise de tours foudroyante et une souplesse de contorsionniste !

Bon, on sait aussi que le Riton avait monté un kit Elite motor 175 cm3 gavé par un carbu Mikuni de 30 mm difficile à régler. Mais une fois les bons réglages trouvés : Pardon ! ça chantait sa joie d'une voix de baryton bodybuildé !!!

Après, on retrouvait les XLS de Rick et d'Olive qui de prime abord n'inspiraient pas un respect débordant, il faut bien l'avouer. Mais si on se penchait un peu dessus, là, c'était pas la même !

Que ce soit la "short track" d'Olive ou "la bleue" de Rick, les deux avaient trouvé la même solution radicale : une démultiplication courte comme une nuit boréale et des pneus cross spéciale bouscaille capables de te trouver de l'adhérence dans une fosse à purin !

Autant vous dire, mes chers lecteurs curieux du dénouement, qu'on n'était certainement pas sortis de l'auberge, une boîte à la mode tenue par un certain Pandore !

Soudain ! (c'est souvent comme ça que le scribouillard en mal d'inspiration tente de relancer l'attention du lecteur mollasson) el Marco freina si fort pour déclencher illico presto une bonne glissade à l'équerre que ses poursuivants s'agglutinèrent dans un freinage d'anthologie à ne montrer dans aucune école de pilotage ... ou alors, si ! Mais aux States, uuuuniquement !
La glisse contrôlée du gascon lui permit de virer au plus court vers un vieux pont romain qui datait de plus loin que le père Mathieu Zalem qu'était pourtant périmé depuis la grande guerre !

Un pont en pierre de taille rongé par le temps et le climat écossais de cette partie septentrionale de la région du "trouducudumonde" mais qui tenait le choc depuis un bail avec sa forme de chat ramassé prêt à bondir sur cette innocente souris qui joue les Mickey.
Derrière, ça s'organise derechef (oui, chef !!!) pour ne pas perdre le contact avec le gascon volant et v'là-t'y pas que cette bande de sagouins va péter dans le parapet d'époque en vraie pierre, très lithique fort heureusement pour les besoins de ses propriétés.

Un entassement de fort belle facture s'en est suivi avec force jurons à la clé ... des champs ! Y nous fait chi*r l'Marco avec son rythme GP et sa bombe supersonique aux pneus accrocheurs comme les pires ventouses d'un calmar géant amoureux (c'est que ça s'accroche ces p'tites bêtes !).
Bon, je vous rassure, chers lecteurs sensibles à l'intégrité physique non des motards mais de leur monture : ya pas eu de mal. Pas une rayure, pas un réservoir enfoncé, pas un guidon tordu ou un cligno explosé, nada, nib, walou, maccache bono ...

Juste que les egos ont été un p(n)eu froissés mais ça, c'est bon pour le reste de la balade car tout le monde va être concentré pire que dans un tube Nestlé pour décrocher la pôle (de la forêt).
Du coup, en deux coups de kick rageurs, on entendit résonner le cor au fond du bois : du BRRRAAAAAAAM ! BRRRRRAAAAAAAMMM ! en veux-tu, en voilà. Du WWWIIIIIIIIIINNNN WWWWIIIIIIIIIINNNNN !!! comme s'il en pleuvait. Du BRRROOOOAAAP ! de fort belle facture. Du BEEUUUUH ! BEEEEUUUUUHHH BOOOOOMMM !!! BRRROOOOOOOOAAAARRRH ! avec le retour de flamme kivabien.
Bref, ça puait pire que sur la ligne de départ du Bol d'or soi-même après le traditionnel lâcher de fauves !

Et là, mes aieux, on est reparti comme en 14 ! Le Marco taille la route à grands coups de gaz autant inutiles que jouissifs, propulsant au passage une tonne de bonne glaise gersoise sur le coin du mourre de ses poursuivants. Mais ces derniers n'en ont cure car leur objectif premier c'est de passer cet enf*iré devant qui m'empêche d'aller taquiner le Marco en cavale comme le pécheur au lancer l'aurait fait avec une belle truite fario.
ça envoyait velu et ça s'accrochait pire qu'une sangsue hypertrophiée à sucer la roue du timono qui précédait.

A ce petit jeu-là, vous vous en doutez, les hectomètres défilaient comme des métronomes bien réglés et les pilotes, pardon, les promeneurs de cette rando somme toute bucolique, rappelons-le à toutes fins utiles, ne s'aperçurent pas que le terrain avait subitement changé.
On était passé des chemins gras des coteaux gersois où le melon exhale un parfum puissant et musqué à une autre période de l'année, à ceux, sablonneux, de la forêt landaise.

Les pins maritimes au tronc noir et la bruyère si verte avec ses fleurs mauves bordaient la voie de sable heureusement mouillé et compact pour les pneus de nos protagonistes ...

Et dans ce paysage qui aurait bien pu être paradisiaque si le climat humide n'avait pas embué les climax et autres dérivés ophtalmiques de nos baladins en goguette, un éclair doré comme un scarabée sur la coiffe de Pharaon transperça le Marco de part en part et le planta là sans autre forme de procès !
C'était pour ce dernier la "gold amère" car le Sergio avait trouvé une levrette shuntant une courbe particulièrement vicieuse et il s'était engouffré dans la faille comme une pluie de gamettes dans un puits d' ... passons.

La tribu des SL qui le marquait à la culotte, connaissant les ruses de Sioux du lascar, l'avait suivi comme son hombre (là on rejoint des relents mexicains) en file indienne évidemment.
Déboulage de grenouilles vertes au milieu de fougères hautes comme des cathédrales ! Fallait oser le challenge car on n'y voyait nib' dans cette luxuriante végétation. Les SL candy green, soudées entre elles à l'argon, un gaz plus rare que le méthane issu du cassoulet, ne se distinguaient plus. On les entendait seulement à leurs feulements p'timonesques ...

Mais une verte traîtresse à l'accent aigu comme la Castafiore s'était faufilée dans cet essaim. Son cri déchirant de 2T couvrit les doux poumpoums des ancêtres aux quatre coups avant de les laisser sur place.
Notre Pit aurait-il pris la mouche ?
Pas le temps de répondre à une question existentielle qui se dilua dans les vapeurs d'huile brûlée car fallait qu'ça avance, c't'affaire !

Lorsque ce paquet de furieux déboucha direct sans crier gare sur l'unique sentier bucolique à des lieues à la ronde, il faillit s'emplafonner direct un autre paquet au taquet occupé à s'arsouiller derrière un Sergio à la limite, fumant comme une locomotive mais heureux comme un pape de faire la nique à tous ces blanc-becs ... pour combien de temps à ce rythme diablement endiablé ?
C'est que derrière, ça se bousculait au portillon dans un désordre que même l'immense chaos de l'univers n'aurait pas pu reproduire !

Faut quand même dire que ça glissouillait fort sur le sable blanc détrempé. A ce petit jeu-là, y en avait un qui, mine de rien, avait trouvé le bon compromis. C'était le Fred dont la XL prune faisait merveille dans ces conditions. La souplesse du moteur alliée à des pneus collants comme des Dim up et à un pilotage cérébral lui conféraient une efficacité redoutable dans ces conditions fort humides.
La beauté de ses dérives auraient fait tirer des larmes de bonheur à Rick si ce dernier n'était pas en train de bûcheronner dans sa roue avec un style certes peu académique mais efficace à sa façon.
Il faut dire que sa monture était rétive avec son trop-plein de chevaux. Sur le sec sa flèche bleue aurait pris le dessus mais là, c'était coton pour contrôler ses poneys sauvages à la poignée de gaz.

Mais le duo avait trouvé la bonne cadence car ils se rapprochaient dangereusement de Sergio et son ombre, el Marco. ça commençait à sentir le roussi sérieux d'autant que les SL tirées par la Kawa leurs serraient les miches de fort près !
Derrière, la chasse s'organisait autour d'un Olive rageur avec un Riton halluciné par le rythme GP de la balade, lui qui pensait croquer du timono sans coup ferrir. Nos deux compères commençaient à avoir bougrement chaud sous leur casque car ça défilait sévère au milieu d'une haie de pins qui, pour maritimes qu'ils étaient, ils n'en avaient pas la douceur pour autant ... surtout après un crash contre leur écorce rugueuse !

Le paquet de mobs s'agglutina en un grondement que Thor n'aurait pas renié lorsque soudain ... tous sautèrent sur les freins pour planter l'avant dans le sable meuble.

Devant leurs yeux horrifiés se dressait une dune qu'on aurait pu prendre pour celle du Pyla si on n'avait pas été encore un peu loin d'Arcachon !
Celle-là avait un flanc raide pentu et ce c*n de chemin l'escaladait, tenu par des racines sournoises jusque là-haut, tout là-haut entre ces deux chênes centenaires dont on se demandait ce qu'ils étaient venus f*utre dans cette galère de forêt mêm' pas domaniale.

Hardi petit ! Le Marco s'élança le premier car il connaissait déjà la rudesse de la pente et croyait la vaincre "à la poignée". J'ai pas dit "à la force du poignet", hein ! Mais plutôt à la poignée ... de gaz !
Cela-dit, entre la théorie et la pratique, ya souvent une gaufre douloureuse en TT ...
et c'est ce qui arriva à l'infortuné dont la roue arrière rebondit sur une racine plus grosse que les autres provocant un aerial aussi involontaire que superbe ... si la belle XLS n'avait pas pivoté en un 180° la précipitant derechef vers son point de départ.

L'honneur était sauf car le Marco n'était pas (encore) tombé. Mais cela ne l'empêcha pas de s'immobiliser sous les quolibets de ses compères de bourres, hilares. Bande de traîtres, va !

Pit le kamikase fit miauler son cylindratrous dans un long hurlement frénétique et lâcha l'embrayage comme s'il n'aimait plus la vie : c'était son heure de glouââââârrreuuuuuux !!!
La KS bondit comme un félin sur sa proie et fila en wheeling à la rencontre de son destin. Nos timonistes qui en avaient pourtant vu d'autres, se frottèrent les yeux devant ce spectacle surnaturel d'une brêle sautant comme un cabrit d'une racine à l'autre, avec, accroché au guidon comme un nourrisson au téton de sa mère, un Pit recroquevillé sur son espoir ténu d'arriver entier en ... bas ?!!!

La Kawa, solidaire de la Red XLS, eut la décence de virer de bord au même endroit mais elle dévala la pente avec, semble -t-il, plus d'enthousiasme en revisitant toutes les racines de l'aller sans exception.
Et c'est un Pit dépité mais entier qui s'affala sur son réservoir à al recherche d'un second souffle qu'il trouva jamais ... sauf pour expirer un glacial "A qui le tour ?"

Et là, mes amis, quelle mouche piqua en même temps Olive et Riton ? Le fait d'avoir trop longtemps sucé les roues peut-être ? Toujours est-il que la noiraude et la blanchette s'élancèrent de concert dans un ronflement sympathique ... sur une trace pas spécialement adaptée pour deux brêles en même temps !
Mais là, magie du spectacle oblige, la noire prit le dessus car la blanche se retrouva dessous et elle poursuivirent sans dessus dessous une montée sans queue ni tête dans un ensemble parfait digne d'une chorégraphie de danse moderne.
On aurait dit du tricot ! Une maille à l'endroit, une maille à l'envers, lorsque l'une rebondissait sur la gauche, l'autre la croisait de peu ...

A ce rythme, les deux monos arrivèrent bientôt au point de oui-retour, car on ne pouvait pas dire de non retour puisque c'est là que les deux brêles précédentes avaient tourné casaque !
Mêmes cause, mêmes effets : la blanche pivota sur la droite sur un pied anglais bien involontaire et la noire se jeta sur la gauche pour ne pas l'embrasser. Et les deux brêlons entamèrent la descente en hurlant leur réprobation BRÔÔÔÔÔÔ !!!!

Les SListes, qui ne voulaient pas tester de salade de soupapes avec leurs 1.220 mm cubes se regardèrent dans le blanc des orbites pour juger de l'état potentiel de démence de l'un de leurs pairs mais aucun ne bougea un cil. Ils ne voulaient visiblement pas laisser leur moteur dans cette côte digne de Sisyphe, le rocher en moins.
Et ce fut Nico le ragtimer qui eut le dernier mot : "Je sais pas vous, mais moi je contourne cette foutue dune"

Joignant le geste à la parole, il se dressa sur ses cale-pieds tel le trialiste chevronné et emprunta aussitôt un petit sentier qui serpentait au bas de la dune triomphante.
Le reste de la troupe penaude lui emboîta le pneu dans une file à rendre un indien jaloux et nul n'eut la présence d'esprit de pourrir le Marco qui ne semblait pas connaître cette échappatoire ..

Et pour cause ! Ce petit chemin qui aurait senti bon la noisette s'il ne puait pas aussi fort le chien mouillé, semblait se terminer en sac de cul, face à un ruisseau transformé en torrent par le ruissellement des eaux pluvieuses de l'orage lacaroumoisin et des environs.

Que faire ?
Rebrousser chemin comme des péteux ? ça JAMAIS, foi de timoniste !
Les motards du dimanche conciliabulèrent dans les hautes fougères bordant ce funèbre Stix au rugissement cascadifère peu engageant.

Mais en y regardant de plus près, les eaux des rivières landaises sont souvent claires comme le cristal de Bohème (ou de Saxe voire d'Arques pour rester françouais). Le fond était bien visible au point qu'on voyait des truites faire du hors-bord en s'aidant de la force du courant.
Ce fond était constitué de sable bien tassé et il était porteur. On pouvait donc tenter le coup, non ?

On allait le tenter ! Mais qui en premier ?
Il fallait trouver la bonne technique et une trajectoire pertinente, sinon c'était le bouillon assuré et avec lui la fin de la balade pour une brêle archi-noyée !
"Hé les mecs ! C'est pas le Marco qui nous a foutus dans cette galère ?"